Rodolphe Christin

«Le Lean est la solution aux problèmes de performance dans le réseau de la santé», affirmait l’ancien ministre de la Santé du Québec, Yves Bolduc, en 2008. Cette méthode de gestion, issue du système de production Toyota, devait permettre de gagner 30 % de productivité et d’efficience, tout en diminuant la bureaucratie et en éliminant les tâches et délais inutiles. Mais qu’en est-il réellement sur le terrain, une douzaine d’années après son implantation dans certains établissements du réseau public de la santé et des services sociaux ? Le Lean est-il la solution miracle que plusieurs ont voulu y voir ? A-t-il tenu ses promesses ?
L’anthropologue Dani Tardif, qui a mené des recherches dans un établissement de Montréal en 2015, démontre au contraire qu’il s’agit là d’une méthode de gestion dangereuse pour la santé des travailleur·euses qui, par son obsession pour l’optimisation et l’amélioration continue, a fini par éliminer l’essentiel du travail de care propre à leur domaine. Plus encore, en leur intimant d’adhérer à son système de valeurs et de croyances, le Lean instaure une nouvelle infrastructure culturelle dont l’intention n’est plus seulement d’appliquer le Lean, mais de devenir Lean. Il est en ce sens une philosophie de l’« être capitaliste », une utopie managériale propre à la société de performance.
À l’heure où le gouvernement du Québec tente d’implanter sa nouvelle réforme de la santé, qui emprunte plusieurs pratiques au Lean sans le revendiquer officiellement, Dani Tardif nous livre un tout autre récit de la transformation du système public de santé et de services sociaux. Avec la conviction profonde que la gestion devrait être au service du travail, et non l’inverse.Détails du livre
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Éditeur
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Texte original
Oui -
Langue
Français -
Date de publication
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Nombre de pages
188
À propos de l'auteur
Dani Tardif
Dani Tardif (iel/elle) est un·e anthropologue et artiste multidisciplinaire qui a fait des études en création littéraire à l’Université du Québec à Montréal et à l’Université du Québec à Rimouski, après avoir obtenu une maîtrise en anthropologie culturelle et sociale de l’Université Concordia.